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Georges Léon


Il fut un homme passionné et passionnant. Passionné parce qu'il vivait par le cœur, laissait parler ses émotions, s'engageait et ne ménageait pas sa peine quand le combat lui semblait juste, un des ces meneurs d'hommes qui parfois arrivent sur terre, on ne sait pas pourquoi, on ne sait pas comment, et que les autres reconnaissent tout de suite pour leur leader. Quand il parlait, on l'écoutait. Cela peut paraître banal. Mais à une époque où plus personne n'écoute personne il est nécessaire de le noter. Passionnant… oh oui qu'il était passionnant. Sa conversation ne laissait personne insensible et touts ceux qui ont eu l'occasion de l'approcher, de vivre une de ces veillées mémorables dans sa maison-musée des Imbert en gardent des souvenirs émus. Combien de fois ai-je assisté au spectacle fascinant de ces hommes férus de philosophie, fiers des longues études qu'ils avaient faites, orgueilleux de leur savoir et qui restaient bouche bée devant le discours d'un homme totalement autodidacte et qui avait tout compris sans l'avoir jamais appris ?

Il avait reçu en naissant un don inestimable : la voix. Ce timbre de voix unique que beaucoup d'entre nous gardent encore dans leurs souvenirs et qui lui permit d'exercer toute sa vie ce merveilleux métier d'artiste qu'il adorait, et de côtoyer les plus grands. Car il visait toujours plus haut. Sa technique vocale il ne la tenait pas d'un petit professeur de chant exerçant son office en Province, mais il était allé la chercher à la source même, en prenant pour modèle Frank Sinatra ou Nat King Cole.

Ce fut un pourvoyeur de bonheur, non seulement pour ses proches mais pour le public qui lui resta fidèle pendant cinquante ans. Que ce soit au cabaret avec les Blue Coral Star, où au Music-Hall, il excellait en tout, il réussissait tout. Les créations qu'il fit dans plusieurs opérettes et revues ne passèrent jamais inaperçues.

Ce natif de Cavaillon avait exercé son métier d'artiste, de saltimbanque (dans le bon sens du mot) dans toute la France, mais c'est chez lui, dans sa maison des Imbert, qu'il aimait se retirer entre deux tournées. L'âge de la retraite étant venu, il s'y était installé définitivement. C'est là qu'il recevait ses amis, ses amis fidèles qui le suivaient certains depuis l'enfance. Et cette amitié n'avait pas de prix. Sa porte restait toujours ouverte, le couvert était toujours mis, pour tous ceux qui venaient chercher un peu de réconfort ou simplement partager quelques heures de vie. Jamais un homme ne fut plus fidèle dans ses amitiés, mais plus que ça, c'était un phare, un roc, un arbre, un refuge pour les voyageurs égarés.

Dans le cœur de beaucoup de Cavaillonnais il reste le créateur de ce groupe d'amateurs passionnés "La Jeunesse en Chanson" qui fit les beaux soirs de Cavaillon voici cinquante ans, pour d'autres il est l'animateur du cabaret le Joker, ou encore Le Cerf, où la jeunesse du département se donnait rendez-vous, pour d'autres encore il est le Dieu de la Sorgue, dans l'opéra Pescaire de Sorgo.

Passionné de brocante, il s'était fait dans ce milieu de nombreux amis et comme il ne faisait jamais les choses à moitié il était devenu une autorité, une référence et beaucoup de professionnels ne négligeaient pas son avis ou ses conseils.

Son autre passion, celle des courses de chevaux, en avait fait aussi ce personnage haut en couleur, volubile, généreux, ouvert, dont la silhouette reconnaissable hante encore les champs de courses aujourd'hui qu'il nous a quitté.

Les années passent, le temps nous déconstruit, la nostalgie nous affaiblit, un peu de rancœur nous abîme le cœur pour l'injustice de la vie qui nous enlève les êtres chers. Mais tant que l'on pense à eux ils restent vivants.

A l'heure de faire le bilan il est une chose qui me satisfait : cet homme-là fut mon ami. S'il ne me reste qu'une fierté, ce sera celle-là.


 
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